Nombre de messages : 1467 Age : 55 Localisation : France Date d'inscription : 03/02/2008
(#) Sujet: Le chant de Françoise Lun 15 Nov 2021 - 16:18
Qu'est-ce qui fait que le chant de Françoise nous emmène si directement dans l'espace d'une intimité qui nous berce? Car il y a presque quelque chose de la berceuse, ici (et dans d'autres chansons). Ici Françoise parle de "distance" et du manque de la présence d'une personne aimée. Mais il y a quelque chose d'éternel dans cette chanson, quelque chose que n'importe qui peut trouver familier, un sentiment auquel s'identifier. Il y a d'abord la notion d'une introversion, ou d'un sujet introverti, qui se projette au dehors, et imagine le monde. Donc, la notion que l'univers n'est pas qu'en dehors de soi, mais aussi en soi. Un peu comme cette notion qui nous fait prendre conscience que nous ne sommes que des poussières d'étoiles. Françoise pourrait même, à la limite, trouver quelque chaleur à la rumeur de ce monde, pourtant bien trop vaste pour être embrassé. Il y a aussi l'expression d'une tendresse dans le son de cette voix, une tendresse innée, peut-être née du sentiment amoureux, ou de caresses absentes, mais que j'imagine aussi profondément féminine dans une maternité naissante. Je m'explique sur "maternité naissante": la femme murmure une berceuse pour l'enfant mais lorsqu'elle n'a pas encore d'enfant, cet enfant elle le rêve, peut-être subconsciemment. La jeune femme porte en elle une tendresse qui n'est pas encore réservé que pour l'enfant qu'elle aura (ou n'aura jamais). C'est pourquoi le tendre son de sa voix nous berce, et nous donne le sentiment qu'elle pourrait aussi bercer le monde entier. Ainsi l'homogénéité de cette chanson, à prendre d'un tenant, est parfaite. Elle nous est communiquée en trois ou quatre dimensions.
Je concluerai ce commentaire spontané par deux citations, l'une de Brassens, l'autre de Rimbaud.
La Jeanne, la Jeanne, Dans ses rose' et ses choux n'a pas trouvé d'enfant, Qu'on aime et qu'on défend contre les quatre vents, Et qu'on accroche à son corsage, Et qu'on arrose avec son lait... D'autres qu'elle en seraient tout' chagrines... Mais Jeanne, la Jeanne, Ne s'en souci' pas plus que de colin-tampon Etre mère de trois poulpiquets, à quoi bon! Quand elle est mère universelle, Quand tous les enfants de la terre, De la mer et du ciel sont à elle...