Françoise-Marie Santucci reçoit dans une interview croisée Françoise Hardy et Julien Doré pour le magazine
Libération Next du 6 avril 2009. Julien termine sa tournée alors que Françoise achève la promo de son autobiographie.
Françoise-Marie Santucci : "Quand commence votre pratique musicale ?"Julien Doré : "Lorsque j'étais aux Beaux-Arts de Nîmes, j'avais le réflexe d'intellectualiser ma production, d'anticiper la réaction des gens. J'ai monté un groupe avec mes amis pour respirer. Mais je n'ai pas été marqué par untel ou untel. J'avais des disques de Nirvana ou d'Iron Maiden qui ne m'ont pas bouleversé du tout. J'ai commencé à jouer vers 18 ou 19 ans parce que j'étais seul, chez moi, fils unique, pas beaucoup de potes et des relations pas forcément évidentes avec les filles. Aujourd'hui c'est différent : J'ai le sentiment de devoir risquer des choses. Voilà le plus cruel : prendre conscience de ce que l'on crée."
Françoise Hardy : "Johnny, Sylvie ou moi, on n'avait pas cette conscience de nous-mêmes. Sinon, je pense qu'on n'aurait jamais rien fait. A 18 ans, je ne savais pas qu'un chanteur devait chanter en mesure, je croyais que les musiciens suivaient. Le frère de Sylvie était musicien, mais elle a atterri là-dedans par hasard puisqu'elle rêvait d'être comédienne. Quant à Johnny, il fallait une bonne dose d'inconscience pour faire ce qu'il faisait alors."
Françoise-Marie Santucci : "Quelle était votre protection ?"Françoise Hardy : "M'exposer le moins possible, refuser le maximum de choses. J'ai toujours envié Manset de ne s'être jamais montré. Mais mes chansons n'étaient pas assez fortes pour que je me permette de rester dans l'ombre. ?
(Se tournant vers Julien) Avez-vous rapidement été conscient de votre charisme – qui n'a rien à voir avec la beauté ou la laideur ? C'est une chance inouïe de crever l'écran. On n'y est d'ailleurs pour rien. J'ai pris conscience de cela assez tard car lorsque j'ai débuté, il n'y avait qu'une seule chaîne, pas de magnétoscope, et le plus souvent c'était en direct : on n'avait aucun moyen de se voir."
Julien Doré : "Je sais que je me suis transformé dans mon rapport aux autres. Mais je n'ai pas conscience de l'effet que je produis."