Il avait la passion, l'audace, la créativité... Françoise Hardy se souvient de Jean-Christophe Averty, décédé le 4 mars à l'âge de 88 ans. L'homme aux 500 réalisations laissera un souvenir fort aux très nombreux artistes passés devant sa caméra, pour ses émissions iconoclastes et inventives. Françoise Hardy explique pourquoi.
Françoise Hardy fut souvent invitée sur les plateaux télé de Jean-Christophe Averty, l'homme qui révolutionna les émissions musicales dans les années 60 et 70. Elle se souvent d'un passionné, bourreau de travail et toujours bienveillant.
- Disparition
Jean-Christophe Averty, homme de télévision et de radio, est mort
« Le style d'Averty aura été un alliage harmonieux et toujours créatif, toujours novateur, entre d'une part l'esthétisme qui lui permettait de jouer savamment avec les couleurs, les cadrages, les lumières — bref, avec l'image et le montage—, d'autre part l'humour et les références culturelles, celles du surréalisme entre autres. Ses réalisations n'ont pas pris une ride, ce sont les réalisations d'aujourd'hui qui semblent dépassées par rapport aux siennes.
Quand Jean-Christophe Averty vous invitait dans l'une de ses émissions, c'était lui la vedette. C'était lui l'artiste. Le chanteur n'était qu'un prétexte pour que sa veine créatrice s'exprime. Et nous ne demandions que ça ! Parce que quoi qu'il nous demande de faire, nous savions qu'au final, ce serait intéressant, beau et original. Il était un spectacle à lui tout seul, quelqu'un de très chaleureux, avec beaucoup de bonté, de gentillesse dans le regard. Bienveillant, respectueux et drôle en même temps. Il ne demandait rien d'impossible, mais en y repensant, je regrette un peu qu'il ne nous ait jamais expliqué avant ce qu'il avait prévu de faire.
À l'époque, nous n'avions pas conscience de l'extrême minutie de ce qu'il faisait : tout était cogité, prévu, préparé, précis — il dessinait tous les plans. Il était extraordinairement perfectionniste. Durant les tournages, il était très calme, très patient, dans son rapport avec les chanteurs, mais survolté pour tout le reste. On le sentait toujours au bord de l'explosion... qui ne manquait d'ailleurs jamais de survenir à un moment ou un autre. Ceci dit, les chanteurs n'étaient jamais l'objet de ses colères, que son cheveu sur la langue rendait cocasses. Et puis un tournage d'Averty sans l'une de ses colères... il aurait manqué quelque chose ! Ses colères donnaient la mesure de la pression où le mettait son perfectionnisme, et de la patience qui était la sienne la plupart du temps.
La dernière image que je garde de lui remonte à dix ou quinze ans ; nous nous sommes trouvés par hasard dans un ascenseur de France Inter. Dès qu'il m'a vue, ses larmes ont coulé. Je me pose encore des questions à ce sujet : pleurait-il à cause du passage et des ravages du temps ? Je pense plutôt que ma présence le renvoyait à l'époque où sa créativité avait libre cours, où il était unanimement reconnu et demandé. Ses larmes exprimaient peut-être la longue souffrance que lui aura valu sa mise à l'écart. »
Source : http://television.telerama.fr/television/francoise-hardy-dans-les-emissions-de-jean-christophe-averty-c-etait-lui-la-vedette,155108.php