« Un Cadeau du ciel », la vérité à tout prix
par Anne-Marie Mitchell
dimanche 8 janvier 2017 08:46
L'ouvrage de F. Hardy paru aux éditions des Equateurs. Photo ED Les Equateurs
Tous les hommes et toutes les femmes de son âge savent très bien ce que veulent dire l'aimer et la comprendre.
Dans La Traversée, Philippe Labro avoue que la maladie lui a fait faire l'expérience de la « mort approchée ». Nombreux sont les écrivains à avoir trempé leur plume dans l'encre du désespoir à la vue de la Camarde brandissant sa faux meurtrière, et à avoir confessé que, par une chance dont ils ne cessent de s'étonner, la Dame en noir a passé sa route pour les laisser vivre. Le témoignage le plus épouvantable nous le trouvons chez Patrick Declerck dans « Crâne » (Gallimard, mars 2016), où le narrateur nous donne à suivre une intervention de plusieurs heures, réalisée éveillé et crâne ouvert... C'est au tour de Françoise Hardy de rassembler tout son courage dans « Un Cadeau du ciel » pour nous révéler (touchante impudeur due à son « inaptitude à feindre ») ce qu'elle ressentit lorsque les médecins de l'hôpital où elle avait été transportée la condamnèrent et qu'elle se persuadait de vivre les derniers instants de sa vie.
« Les troublantes révélations sur ce par quoi je viens de passer me font vite penser qu'il doit y avoir une raison pour que de là-haut on m'accorde un sursis, alors que je suis à bout de course. Il faut toujours que je trouve une cause surnaturelle aux choses apparemment miraculeuses, comme si je ne concevais pas qu'elles puissent arriver sans raison ou pour des raisons logiques, sans rapport avec un au-delà dont rien ne prouve la réalité. »... On reconnaît, par la faveur de cet aveu, l'auteur de « Entre les Lignes, Entre les Signes », livre co-écrit avec la graphologue Anne-Marie Simond. Comme on reconnaîtra, au fil des pages, la main qui ne s'embarrassa d'aucun scrupule, dans ses ouvrages précédents, pour dénoncer les ravages de la vieillesse, les idéologies, le sectarisme, le spectaculaire, les mensonges (religieux ou politiques). Égale à elle-même, elle met la brosse à reluire au panier et distribue quelques claques.
Si l'astrologie, la méditation, et la spiritualité, ont leur place dans cette narration où la douleur physique et les vieilles blessures non cicatrisées rivalisent avec une accalmie et l'attente de la guérison, il est incontestable que les lecteurs ne sauraient être indifférents au coma dans lequel le corps médical l'obligea à plonger après trois semaines d'inconscience, ni à l'opiniâtreté du lymphome dont elle souffre depuis des années et qui s'acharne à ajouter d'autres épreuves à son calvaire, telle que la fracture de la hanche et du coude pendant son hospitalisation. Heureusement que des amis veillent, que Jacques est venu lui tenir la main et que son fils (elle aurait tant voulu lui épargner « ce désolant spectacle ») l'aide à s'accrocher pour ne pas renoncer à se battre contre le mal qui menace de mort. Un récit qui redonne de l'énergie à ceux qui seraient tentés de lâcher prise. L'espoir n'est-il pas la manifestation du triomphe de la vie ?
Anne-Marie Mitchell
« Un Cadeau du ciel », par Françoise Hardy, aux éditions des Équateurs, 190 pages, 18 euros.
source : http://www.lamarseillaise.fr/culture/livres/55986-lecture-un-cadeau-du-ciel-la-verite-a-tout-prix