Juillet / Août 2005 - Arts Magazine - Partie 2

AM : Quand votre fils Thomas était enfant, avez-vous essayé de lui faire aimer l'art ?
F.H. : Comme beaucoup de mamans, je lui lisais Le Petit Prince, ce chef-d'œuvre absolu. Et puis, il s'intéressait à Hitchcock et nous allions voir ses films ensemble. Mais je ne me souviens pas l'avoir traîné dans des musées. Jacques (Dutronc) s'intéresse plus au dessin et à la peinture que moi, il avait même commencé une école de dessin.

AM : "Traîner" Thomas dans les musées ? Vous ne les aimez guère…
F.H. : J'ai horreur des musées ! Même si j'ai découvert Francis Bacon dans un musée londonien… Quand j'étais plus jeune, je voyageais beaucoup, et j'en profitais pour visiter les grands musées. Par devoir d'ailleurs, bien plus que par envie ! Un musée a toujours quelque chose d'un peu mortuaire : une promenade dans les bois m'excite bien davantage… Et je ne suis pas la seule à le penser : pour beaucoup de gens, musée égale ennui. Comment faire pour leur donner envie d'y entrer ?

AM : Peut-être faudrait-il expliquer davantage les œuvres ? Mettre l'art à la portée de tous ?
F.H. : Difficile, je crois qu'il faut d'abord s'y intéresser ensuite on trouve toujours l'énergie nécessaire pour nourrir cet intérêt.

AM : Faut-il mettre l'histoire de l'art au programme des lycées ? Ou à la télévision ?
F.H. : Que veut dire "art ?". C'est tellement vaste ! Il y a les arts majeurs, qui requièrent une initiation, et les arts mineurs, qui n'en requièrent aucune. Il n'empêche que certaines œuvres mineures sont plus inspirées que bien des œuvres majeures…

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A priori, oui je dirais pour ma part qu'il faut mettre l'histoire des arts au programme scolaire. Dans les années 80, on avait des cours de dessin et de musique, mais de qualité très variable selon les profs. Une prof de musique m'a fait découvrir les Danses Polovtsiennes de Borodine et je l'en remercie. Bon, en classe de 3ème, tu vois bien qu'il y en a peu qui écoutent... Ils ne prennent pas ça au sérieux, et c'est de la faute du prof ou de l'enseignement. A priori je ne vois pas de raison d'enseigner plus sérieusement les maths que la musique...

J'avais suivi l'orientation lettres et arts plastiques au lycée, et j'ai appris plein de choses en étudiant l'histoire de l'art. Aujourd'hui je suis très content de savoir reconnaître un Braque d'un Picasso (par exemple). J'ai une solide connaissance de l'histoire de la peinture, et je trouve ça utile. Cela enrichit la sensibilité. Le style d'un Utrillo, d'un Lautrec, d'un Modigliani... Sûr qu'on peut s'intéresser à tout ça en autodidacte, mais les enfants et les ados, il faut les pousser un peu.

De l'importance des musées? Un exemple: lorsque je voyais des tableaux du Greco dans des livres, ça ne me bottait pas des masses. Mais j'en ai vus en vrai à Tolède, et je suis resté bouche bée devant la verticalité vertigineuse de ses oeuvres, très mystiques, qui vous attirent vers le haut. Là j'ai compris qu'il existait aussi un vertige du haut clown

. Sans parler des couleurs, très vives chez lui, illuminantes, associées à son sens des perspectives allongées, comme aspirées par le ciel...

L'école peut permettre de découvrir l'art à condition que l'élève soit ouvert à la matière.
Cela exige de la part du professeur de musique, de littérature ou d'art plastique d'être particulièrement captivant. En littérature c'est probablement un peu plus facile mais qui n'a pas maudit une lecture obligatoire pour un livre peu palpitant ? Sinon, la musique et l'art plastique sont surtout vus comme des matières de détente pour déstresser et bien peu y apprennent quelque chose.

Je pense qu'on ne peut découvrir tout ça qu'un fois qu'on a soi-même la petite étincelle qui fait germer le désir. Ensuite de fil en aiguille, on peut de soi-même aller vers les musées. Mais bon ce n'est que mon humble avis.