Début de l'interview parue dans le magazine Télémoustique du 1er octobre 2008TéléMoustique n°4314 du 01/10/2008
Françoise Hardy: Dans l'intimité d'une femme | Dans un livre à paraître le 9 octobre, elle retrace sa double vie de femme et de chanteuse. Un exercice difficile de confession où elle s'attarde sur le mystère de sa relation avec Jacques Dutronc. Il ne faut pas être dans les petits papiers de Françoise Hardy pour se douter que Jacques Dutronc n'a jamais été un mari "classique" et à domicile. Leur histoire personnelle ne nous a d'ailleurs jamais regardés, même s'ils font partie, avec Johnny Hallyday et Sylvie Vartan, Serge Gainsbourg et Jane Birkin, Michel Berger et France Gall, des couples qui ont fabriqué la mythologie de la variété française. Cette histoire nous regarde un peu plus aujourd'hui qu'elle nous est livrée par Françoise Hardy elle-même. Dans Le Désespoir des singes et autres bagatelles, la chanteuse s'adonne à un exercice - raconter ses souvenirs - dont on pensait qu'il ne l'intéresserait jamais. Sans doute le pensait-elle aussi... |
Dans un récit où elle croise parcours professionnel et cheminement personnel, elle évoque les difficultés sentimentales qu'elle avoue avoir elle-même contribué à faire naître dans ce couple où il y en avait une qui souffrait et l'autre qui cavalait. Ses rencontres artistiques, la conception de ses albums, sa passion pour l'astrologie, la psychologie, les médecines douces, mais aussi sa vie de femme (contraception, grossesse, avortement, fausse couche), ses accès de jalousie... Son incapacité à réagir face à l'être aimé, son allégresse à se brûler dans la passion d'un autre homme dont elle tait le nom, son fils... Tout est dit, sans fracas ni éclat, mais avec les mots les plus justes, ceux qu'elle n'a jamais dits en public.
Dans quel état d'esprit vous trouvez-vous à la veille de la sortie de ce livre?Je n'y pense pas trop. Je n'y pense pas trop parce que, en effet, si j'y pense, je peux être inquiète du foin que certains journalistes sont susceptibles de faire à propos de choses que je dis sur ma vie personnelle.
Quel a été le déclic?C'est un livre que je ne voulais pas faire, ce n'est pas du tout mon idée... J'ai vraiment été tannée pendant plus de trois ans par un éditeur à qui je disais que je n'avais rien d'intéressant à raconter. Le succès du livre de Sylvie Vartan (Entre l'ombre et la lumière) a fait rêver beaucoup d'éditeurs, mais Sylvie a eu une vie très extravertie, elle a beaucoup bougé, beaucoup voyagé, alors que moi, j'ai passé ma vie en vase clos. Un concours de circonstances a fait que j'ai rencontré une journaliste du Nouvel Observateur. On a fait une première interview pour un bouquin et quand j'ai vu la retranscription, je me suis dit "Où on va, là? Qu'est-ce qu'ils veulent? S'ils veulent un récit autobiographique, il n'y a que moi qui peux le faire". J'avais une année sabbatique devant moi, je me suis lancée, en prévenant l'éditeur que je commençais sans savoir si je finirais.
En écrivant ce livre, vous vous êtes confrontée au risque de l'impudeur.Ce qui était très important, c'était restituer la vérité de mon vécu, de mon ressenti. Je sais bien qu'en parlant de son ressenti et de sa vie intime, on peut être impudique. Mais je suis quelqu'un de sentimental et à partir du moment où vous faites un récit autobiographique, vous ne pouvez parler que de ce que vous connaissez. Et les sentiments, je n'en ai pas fait le tour, mais je connais...
Vous racontez cette scène où, enfant, vous offrez une image pieuse à une fille de votre classe que vous admirez en secret et vous retrouvez l'image le lendemain dans une poubelle. Vous écrivez que c'est votre premier chagrin d'amour...Qui allait préfigurer tous les autres. C'est le problème des personnes introverties, elles sont fixées sur des sentiments secrets qu'elles n'osent pas exprimer et qui vont vers la déception. J'ai découvert que je ne représentais rien pour cette fille et c'est toujours douloureux, c'est une révélation (rire).
C'est une scène où vous découvrez aussi l'humiliation.(Long silence.) C'est une question très compliquée. Il ne faut pas confondre l'amour-propre et l'amour. Je ne pense pas avoir été blessée dans mon amour-propre. Cette fille représentait beaucoup pour moi, mais être déçu, c'était plutôt vivre une douleur affective.
Est-ce un scénario qui s'est répété le long de votre vie?J'essaie de dire dans ce livre qu'on a tous une problématique. Ma problématique à moi, elle est plutôt masochiste. En tout cas, j'ai beaucoup d'inhibitions sur le plan sentimental, j'ai tendance à surévaluer la personne aimée et à me sous-estimer. Ça rend les rapports compliqués. J'avais envie de parler de ça. Du fait que, par ses propres attitutes, on induit soi-même le comportement de l'autre. On n'est pas innocent de ce qui nous arrive. On a l'impression que l'autre se comporte avec vous comme un goujat. Ensuite, on réalise que, si on avait été à sa place, devant nous, on aurait été aussi excédé, on aurait été impatient, désinvolte. Mais ça, j'ai mis beaucoup de temps à le réaliser.
La suite dans votre TéléMoustique...
(source : http://www.telemoustique.be/tm/magazine/5737/Francoise-Hardy-Dans-lintimite-dune-femme.html)