[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]31 Octobre 2008 - 11:54
Françoise Hardy : message personnel
Portrait. Dans son autobiographie « Le désespoir des singes... et autres bagatelles », elle révèle tout : maladie, amours, trahisons. Match Musique Par Catherine Schwaab/Paris Match. Photo : archives Paris MatchElle n’habite plus sa belle maison du quartier d’Alésia, dans le sud de Paris. Trop d’escaliers pour ses genoux fragilisés, dit-elle. A la regarder glisser, fluide et droite comme un roseau, dans la pénombre de son nouvel appartement, on s’étonne. A 64 ans, Françoise est devenue inoxydable. Un mètre soixante-douze et 50 kilos de fragilité pleine de grâce. Une peau tendue, si blanche, si fine, un regard bleu-gris, une voix étrangement inquiète, comme s’il lui fallait constamment réaffirmer, requestionner, redémontrer. Elle n’arrête pas de se torturer les méninges.
En même temps, comme la résume son ami Jean-Marie Périer, « elle est le chemin le plus court entre la pensée et la parole ». Pas de remplissage diplomatique. Ce qui opère très vite un tri parmi ses relations. Il y a ceux qui se vexent, et les autres. Quand, il y a quarante ans, Aznavour, déjà star entourée d’une cour, lui écrit une chanson, « la grande » n’a pas le temps de retenir son verdict : « Mais c’est très mauvais ! » C’est Jean-Marie qui raconte. « Seul Aznavour s’est marré. »
Elle n’a pas changé. Quand maintenant elle vous raconte sa vie, on est éberlué par son impitoyable franchise. Avec son culot de grande timide, elle affronte tout, de son enfance pas très heureuse à ses récents problèmes de santé : un lymphome de Malt, une sorte de cancer soigné par chimiothérapie.
Presque 400 pages de révélations ciselées avec une précision d’entomologiste. Des rapports exécrables avec une mère abusive qui s’est fait euthanasier, un père absent, homosexuel sur le tard, une sœur schizophrène, paranoïaque et suicidaire, un dépucelage purement « technique »... Sans parler de ses humiliations de femme amoureuse d’un bel indifférent. Jacques Dutronc a été fou d’elle avant de vivre des histoires parallèles, avec peut-être Bambou entre autres, croit-on comprendre, une amie égarée que Françoise voulait aider... Le pire étant peut-être l’affaire Romy Schneider. En ces années 70, le cynisme d’un certain milieu de producteurs n’avait rien à envier aux années 2000. « L’actrice avait besoin, paraît-il, de tomber amoureuse sur chaque tournage, raconte Françoise. Il fallait que ce soit Jacques qui se dévoue ! » Elle croit d’abord, « dans ma grande naïveté, que Jacques aura suffisamment d’amour-propre pour ne pas passer à la casserole ».
Evidemment, elle tombe de haut. C’est Zouzou, une reine de la nuit nettement plus dégourdie, qui l’affranchit, en termes crus et détaillés. Pas manipulatrice pour un sou, l’épouse bafouée fonce chez son mari : « Je me sentais écartelée entre l’obligation de rompre et l’impression dévastatrice de ne pouvoir me passer de lui. J’étais là, devant lui, comme le drogué en manque qui, après avoir passé la nuit à se jurer de tout arrêter, est prêt à tuer père et mère dès que la drogue redevient à portée de main, pour y goûter encore...» Elle est pile dans la logique du film de Zulawski que tourne son mari, « L’important c’est d’aimer ».
Il faut la voir décortiquer son masochisme conjugal, son incapacité à « ferrer » Jacques, à le faire bisquer. Cette fille qui subjugue sans s’en apercevoir Mick Jagger, Bob Dylan, Eric Clapton et mille autres est bien le contraire d’une peste. Au lieu de cela, « j’ai toujours été dans l’abnégation, donnant à Jacques l’impression de lui être acquise. J’ai vécu dans la terreur de le perdre, et je le lui montrais ». Elle se regarde fonctionner, se fourvoyer, s’enfoncer avec une quasi-délectation. « J’aimerais que ce livre soit utile. J’ai tellement analysé le couple...»
Aujourd’hui, il a beau être avec Sylvie, Jacques n’a pas la moindre intention de divorcer de Françoise, il l’a décrété clair et net. « Sans se soucier le moins du monde de mon éventuel avis sur la question », ironise cette incorrigible complexée affective. Elle connaît bien l’oiseau : « Résistance au changement ? inertie ? Des notions bien commodes que l’on confond parfois avec la fidélité. » Mais quand, inquiet, il doit passer sur le billard à cause de sa hanche, c’est Françoise qui s’occupe de lui, le rassure, le dorlote... Au téléphone avec une journaliste : « Je n’ai pas le temps de vous parler, je dois faire à manger à mon mari qui ne va pas bien du tout ! »
Les fans la comparent à « un long cygne argenté », mais elle est aussi fébrile qu’une adolescente survoltée. Capable des mêmes emportements. Ce soir, elle s’énerve contre ces journalistes télé qui diffusent toujours les mêmes trois ou quatre chansons. « Alors que j’ai aussi écrit des perles, et personne ne les connaît, personne ne veut les entendre ! » Sans parler des images pour illustrer tout ça : « Il a casé un homme nu en guise d’évocation ! » Shocking ! Où en sont ses amours, justement ? La réponse fuse : « Je me considère hors-jeu. Le contraire serait indécent. » Et d’évacuer la question d’un abrupt : « Un corps qui vieillit... Non, je deviendrais trop crue. »
(source : http://www.parismatch.com/parismatch/Match-guide/Match-Musique/Francoise-Hardy-message-personnel/(gid)/55459)